Accueil » Lectures » Khadija, le journal d’une kamikaze de Marina Akhmedova

Khadija, le journal d’une kamikaze de Marina Akhmedova

Je remercie Mass critique de Babelio et les Editions Louison pour la lecture de ce livre.
L’histoire nous entraîne au Daghestan, une république du Caucase du Nord. A la campagne, les traditions ancestrales sont tenaces et les femmes grandissent dans l’ombre de leur mère. L’horizon sera de porter chaque jour l’eau glacée de la source, d’épouser un homme choisi par les aïeux, de tenir une maison sous l’œil acéré de la famille.
Orpheline, Khadija grandit sous le joug d’une grand-mère acariâtre, parfois violente. Dans cet univers clos, étouffant, les médisances vont bon train,la pauvreté, la misère sont un moindre mal par rapport au déshonneur. Ces mentalités rétrogrades nourrissent les gens des villages et Kadhija ne déroge pas à la règle. La jeune fille rêve de toilettes, d’un beau mariage avec Makkatch, le fils du général qui vient de temps à autre en villégiature au village.
Parce qu’elle l’a promis à sa mère mourante, sa tante l’emmène vivre à la ville voisine. Kadhija suivra des cours à l’université. Pourtant, à Makhatchkala, la corruption gangrène tous les rouages de la vie. L’argent règne en maître et la jeune fille quitte l’emprise de sa grand-mère pour celle de sa tante. Elle retrouvera Makkatch et vivra une histoire d’amour avec lui, une Roméo et Juliette interdite. Il se marieront en secret , une fille pauvre de la campagne n’épouse pas le fils riche d’un général. Mais, leur bonheur sera de courte durée. Makkatch, rongé par les crimes de son père, deviendra un terroriste et sera tué par les forces spéciales. En déshérence, rejetée par les siens, Kadhija connaîtra une fin tragique. Elle se fera exploser dans un couloir du métro de Moscou.
Cette lecture de 500 pages se suit facilement même si elle est parfois pesante, dérangeante. Le point de vue interne du journal permet de connaître les pensées de l’héroïne. Elle apparaît dans toutes ses contradictions. Jene fille limitée, son manque de réflexions, d’analyse peut irriter. Le style souvent lyrique porte une écriture travaillée et bien traduite.
Le destin tragique de Khadija hante dès le début du récit mais le basculement dans le terrorisme occupe avant tout les 100 dernières pages. Dans sa retraite, la lecture du Coran, la prière deviennent les seules bouées de l’héroïne. Elle deviendra « un instrument de vengeance » au nom de son mari mort, au nom d’Allah et l’enfant qu’elle porte n’y changera rien.
Dans ce monde violent, les jeunes se réfugient dans les forêts, dans le terrorisme. Ils trouvent dans la Foi, la seule vérité loin de la perversion de la société. Et pourtant, ils reproduisent des violences monstrueuses.
On aimerait mieux comprendre l’acte d’une Kamikaze, cet acte gratuit, suicidaire, mais surtout meurtrier, assassin. Le terrorisme n’est-il pas aussi la trajectoire d’un individu, une histoire de vie, sans avenir qui conduit à la mort, à des actes terrifiants ? Je ne sais. Kadhija pose plus de questions qu’il n’apporte de réponses.
N’oublions que ce récit garde l’empreinte de l’âme slave. Le destin peut être tragique comme le fil vert  enserrant maléfique, Kadhija dans ses rêves.
Parce qu’ils me semblent légitimes, je laisse les derniers mots à Pouchkine :
« Et le bonheur était si proche,
Si possible… Mais le destin
A tranché. J’ai agi peut-être
Trop vite. »

 

kadhija

 

Khadija, le journal d’une kamikaze de Marina Akhmedova aux Editions Louison

3 réflexions sur “Khadija, le journal d’une kamikaze de Marina Akhmedova

  1. Un sujet difficile. Trop lourd pour moi, les mots m’emporteraient dans trop de noirceur dont j’aurais peine à sortir. Donc j’évite ce genre de livres mais je suis contente qu’ils existent. Merci pour le partage, bon long we 🙂

    Aimé par 1 personne

Laisser un commentaire